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Qui mérite d'être mal payé ? Pourquoi un trader gagne 5x plus qu'une infirmière ? Que se passerait-il si on était tous payés pareil ?
Voici Baptiste Mylondo, prof et auteur de "Ce que nos salaires disent de nous" sur les inégalités salariales et le revenu inconditionnel !
Merci à l'Institut Transitions de nous avoir accueillis pour l'enregistrement !
SOMMAIRE
02:06 Questions mitraillette
03:03 Anecdote
04:27 Mentir sur son salaire
06:17 La journée de la jalousie
07:10 Pourquoi un trader gagne plus qu’une infirmière ?
12:43 Qui mérite d’être mal payé ?
14:50 Et si tout le monde gagnait pareil ?
19:58 C’est quoi un salaire juste ?
29:51 Quelles solutions ?
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[00:00:56] Oui ! Bienvenue dans Soif de Sens, l'émission podcast et YouTube qui t'aide à construire une vie et une société pleine de sens. Chaque semaine, je reçois un humain écolo ou solidaire pour t'aider à incarner le changement. Et aujourd'hui, on accueille Baptiste Milondo pour parler de ce que nos salaires disent de nous. Faites un maximum de bruit pour Baptiste s'il vous plaît ! Alors Baptiste, tes profs, est-ce que tes élèves t'accueillent comme ça le matin Baptiste ? Bien sûr, à chaque fois. Bah je n'en doute pas, c'est une rockstar.
[00:01:25] Alors je te présente en 10 secondes, donc tes profs d'économie et de philosophie politique, militant de la décroissance et du revenu inconditionnel et auteur donc de ce livre éponyme, « Ce que nos salaires disent de nous » où t'interrogent la légitimité des inégalités de salaire. Pourquoi est-ce qu'il y en a qui en ont des petits, des gros, est-ce que c'est mérité ? Et t'imagines à quoi pourrait ressembler un partage plus juste et équitable des revenus ? Avant de plonger dans le sujet, je te propose de lancer l'épisode par une série de questions mitraillettes légères pour se mettre dans le bain,
[00:01:53] auxquelles tu dois essayer de répondre le plus vite possible. Ok. Il n'y a pas de questions pièges, mais si tu es un peu sous pression, ça fait un peu une revanche vers les profs que j'aimais. Attends, est-ce que tu es prêt ? Vas-y. Top ! Tu préfères doubler ton salaire ou bosser deux fois moins ? Bon, bosser deux fois moins, sans hésitation. C'était quoi ton premier job ? Agent de nuit dans une maison de retraite. Ok. Quel est le métier sous-payé que tu aurais adoré faire ? À part prof.
[00:02:23] Que j'aurais adoré faire ? Écrivain, je trouve que c'est pas mal comme métier sous-payé. Trop bien. T'as déjà menti sur ton salaire ? Non. C'est quoi, selon toi, la plus grosse injustice salariale que t'as vue ? Ah bah ça, j'en vois tous les jours, du coup. Ou une qui te vient à l'esprit, là. Je croise régulièrement une voisine qui fait le ménage pour des entreprises. Qui paye la misère. Ouais.
[00:02:51] Dans un monde idéal, combien devrait gagner cette voisine, par exemple ? Autant que les autres. Ouais. Super. J'ai peur que tu ouvres un tunnel, mais en fait, réponse parfaite. Effectivement, dans ton livre, tu racontes l'histoire d'Anne, où en soirée avec deux potes, ils sont trois amis, du coup, ils ont décidé de se révéler leur salaire exact. Je sais pas si vous avez déjà fait ça. Si on suit cet exemple, ne le faites pas, parce que ça a mal tourné.
[00:03:16] Est-ce que tu peux nous raconter cette anecdote et développer pourquoi le simple fait de révéler son salaire, ça peut créer autant de tensions ? Ouais, alors là, dans cette anecdote, du coup, c'est trois jeunes qui ont fait à peu près le même type de parcours scolaire et universitaire. Donc, ils ont tous un bac plus 5. OK. Simplement, ils sont pas partis dans les mêmes types de secteurs. Il y en a qui bossent plutôt pour le secteur lucratif et un qui bossent pour le secteur non lucratif. Et quand ils dévoilent chacun, chacune leur salaire, ils se rendent compte qu'il y en a deux qui sont payés vachement plus que le troisième.
[00:03:47] Et le troisième, on s'est dit, mais c'est clairement injuste. En fait, on a à peu près le même type de diplôme. Vous vous êtes payé vachement plus. Et les autres lui expliquent que, bah oui, mais lui, il sauve le monde. Donc, il peut pas demander à sauver le monde et en plus, à être payé autant que les autres. Donc, ça crée des petites tensions. Dans un monde idéal, tant qu'à faire, autant payer ceux qui font le bien. Ouais, mais alors le raisonnement, c'est...
[00:04:12] En fait, là, les deux qui sont les mieux payés, ils ont des boulots qui ont clairement pas de sens. Et ça, c'est particulièrement pénible, en fait. Enfin, il faut vraiment une bonne motivation pour pouvoir se lever tous les jours à aller faire un boulot qui a pas de sens. Et du coup, cette motivation, on va le trouver dans un surcroît de salaire. Ouais. Effectivement, 45% des Français ont déjà menti sur leur salaire. Donc, la moitié, ici dans la salle, vous êtes des mythos. À la hausse ou à la baisse, selon le contexte. Normal, en fait, selon la sociologue Janine Mossuz-Laveau, j'espère ne pas écorcher son nom,
[00:04:41] parler d'argent est même plus tabou que parler de sexe. Sauf que, bah, ce tabou, il alimente l'ignorance. On surestime généralement ce que les autres gagnent. Par exemple, les cadres surestiment le SMIC. Et donc, on va tous sous-estimer en moyenne notre propre place dans la hiérarchie des revenus. Pourquoi, Baptiste ? Est-ce qu'on surestime les salaires des autres ? En fait, on a souvent une mauvaise vision de la distribution des salaires dans notre société. On va toujours imaginer que les 10% les plus riches gagnent vraiment beaucoup, beaucoup, beaucoup plus que nous.
[00:05:11] Or, aujourd'hui, on fait partie des 10% les mieux payés de France quand on gagne plus de 4 000 euros par mois. Et en fait, si on avait fait un test... En brut, en net. En net. OK. Du coup, si on avait fait un test, j'imagine, là, dans la salle, je pense que la plupart auraient donné des montants beaucoup plus élevés. Et donc, on va avoir tendance, comme ça, à surestimer les niveaux de rémunération des autres. Et en plus, vu que cette question des salaires est relativement taboue, on doit se contenter d'évaluer le niveau de rémunération des autres simplement par les indices qu'on peut avoir.
[00:05:39] Le type de voiture qu'on va conduire, le type de loisirs qu'on va avoir, le type de vacances qu'on va passer, le type de logement dans lequel on habite, où est-ce qu'on habite, etc. Et donc, ça nous conduit à surestimer le niveau de rémunération des autres. Et du coup, ça alimente un sentiment généralisé d'injustice, même chez ceux qui sont objectivement privilégiés. Il y a cette stat qui est rigolote que seuls 7% des Français pensent faire partie des 30% les plus riches. Il y en a qui se trompent. Donc, au lieu de 30%, évidemment. Donc, voilà.
[00:06:06] Mais oui, moi, ce que tu dis, ça me fait clairement penser à mon père qui est médecin, donc qui a très bien gagné sa vie maintenant, il est à la retraite et qui roule en Clio. Si tu le regardes de l'extérieur, oui, je pense que tu ne te dis pas forcément qu'il a bien gagné sa croûte. Une des solutions, ce serait d'avoir plus de transparence pour mettre en lumière les écarts de salaire et les injustices actuelles. Et se demander quels écarts de rémunération sont justifiables ou pas. Et en Finlande, il y a ce truc incroyable dont tu parles. Une journée de la jalousie où un jour par an, tout le monde peut voir l'avis d'imposition de n'importe qui.
[00:06:36] C'est génial ? C'est génial. Je ne sais pas si c'est génial. On peut imaginer une transparence plus complète, mais effectivement, ça permet de faciliter le consentement à l'impôt aussi. De voir exactement combien gagne chacun, combien chacun va payer en impôt. Ça permet aussi de se restituer un petit peu dans la société et de plus facilement consentir à l'impôt. Donc, je ne sais pas si c'est génial dans le sens où c'est qu'un jour par an, ça ne permet pas de gérer les questions d'inégalité salariale au sein des collectifs de travail, par exemple.
[00:07:05] Mais davantage de transparence que dans notre société, sans doute que c'est souhaitable. Ok. Alors pourquoi ? La question un peu centrale. Pour caricaturer, un trader va gagner dix fois plus qu'un infirmier alors que ce dernier sauve littéralement des vies. Pourquoi certains métiers essentiels sont si mal payés, que ce soit les profs, les éboueurs ou les asmats ? Alors ça, c'est le point de départ du livre. En fait, c'est pour ça que ce livre m'a été commandé par les éditions Payot.
[00:07:32] Parce qu'en fait, on s'est rendu compte, notamment dans le cadre du confinement, dans le cadre de la crise du Covid, que les premiers et premières de corvée jouaient un rôle juste indispensable dans notre société. En fait, notre vie n'aurait clairement pas été la même si il et elle n'avaient pas été là. Et malgré tout, on s'est rendu compte que c'était aussi les personnes les moyens payés de notre société. Donc du coup, on s'est rendu compte qu'il y avait une décorrelation totale entre utilité sociale, contribution à l'utilité commune et niveau de rémunération.
[00:08:01] Donc on s'aperçoit du coup que c'est d'autres critères qui permettent de justifier aujourd'hui, enfin qui permettent de justifier aujourd'hui les inégalités salariales. Ça va être notamment le niveau d'études, ça va être la productivité, ce type de critères. Et puis, en dernière instance, le rapport de force sur le marché du travail, qui vont permettre de comprendre les inégalités salariales à défaut de les justifier. Oui, le rapport de force nous dira l'offre et la demande ? Oui, l'offre et la demande sur le marché. Oui, tu cites une étude de la New Economics Foundation qui montre qu'un néboueur rapporte 12 fois plus à la société qu'un banquier d'investissement.
[00:08:31] Oui, c'est une étude qui est, j'allais dire rigolote, qui est étonnante. Le prof est toujours très bon. Qui date de 2009, mais qui serait toujours valable aujourd'hui. En fait, c'est trois chercheuses qui ont regardé, qui ont comparé les niveaux de rémunération de six professions différentes. Donc il y a l'éboueur, il y a l'assistante maternelle, l'auxiliaire de puriculture, il y a l'agent d'entretien en milieu hospitalier, le trader, le commercial dans la pub et le gestionnaire de fortune.
[00:09:01] Et en fait, à chaque fois, les chercheuses essayent de comparer la contribution à l'utilité commune et le niveau de rémunération. Et on s'aperçoit que le niveau de rémunération est inversement proportionnel à la contribution à l'utilité commune. C'est-à-dire que les boueurs, l'agent d'entretien en milieu hospitalier, l'auxiliaire de puriculture ont une contribution positive à l'enrichissement collectif et ont les niveaux de rémunération les plus faibles.
[00:09:24] À l'inverse, le cadre dans la pub, le banquier et le gestionnaire de fortune ont une contribution négative à l'enrichissement collectif. C'est-à-dire qu'ils pénalisent la société et malgré tout, ce sont les trois qui sont les mieux payés. Sur les exemples, ça peut se comprendre assez facilement, mais comment tu mesures ta contribution à l'interprétation ?
[00:09:45] Tu ne connais peut-être pas les détails des détails des détails. Par exemple, pour les éboueurs, c'est en quoi est-ce qu'ils contribuent à améliorer le cadre de vie, l'environnement ?
[00:10:15] En quoi ils contribuent à l'économie circulaire ? En quoi ils contribuent à réduire le développement des maladies ? Donc tout ça, ça peut être chiffré. Qu'est-ce que ça permet à la société d'économiser en coûts induits ? Si cette activité n'existe pas, ça va impliquer des coûts pour la société. Tout ce qu'on économise, c'est ce qui va être créé par ce type d'activité. Je précise tout de suite que c'est une vision tronquée de la contribution à l'utilité commune.
[00:10:43] Là, encore une fois, ce ne sont que les coûts économisés. Je donne un exemple dans le livre avec une autre étude britannique du ministère des Affaires sociales britannique qui essaye d'évaluer le retour social sur investissement d'un lieu d'accueil, d'hébergement de personnes toxicomanes. Ok. Et donc, il y a le cas d'une femme qui a été hébergée dans ce centre d'accueil.
[00:11:10] Et elle avait trois enfants. Et donc, elle explique clairement que ce centre lui a juste sauvé la vie. Il lui a sauvé la vie. Il a sauvé sa famille. En fait, ça lui a permis de garder un lien avec ses enfants. Donc, le rapport dit en fait, ça nous a permis d'économiser des frais de garde, de placement, etc. Ce qui est vrai. Mais se limiter à ses seuls frais de placement, seuls frais administratifs, on voit qu'on est très, très, très loin de la valeur réelle du service qui est proposé.
[00:11:39] Et donc, qu'est-ce qui bloque une vraie revalorisation de ces métiers utiles ? Alors, en fait, le vrai problème, c'est que les salaires sont toujours relatifs. C'est-à-dire que quand on parle de pouvoir d'achat, généralement, régulièrement, dans le débat public, on retombe sur des questions de pouvoir d'achat. À l'arrivée, si je dis j'ai un problème de pouvoir d'achat, ce que je dis en sous-texte, c'est vous me coûtez cher. Concrètement, tout ce qu'on paye, c'est le salaire des autres et la propriété des autres.
[00:12:07] Revaloriser ces métiers essentiels, ça impliquerait pour nous une forte hausse du coût de la vie. Et c'est là qu'on voit que le salaire est relatif. Derrière, il y a forcément une logique de rapport de force. Donc, c'est essentiellement ce rapport de force qui bloque aujourd'hui. C'est-à-dire qu'Emmanuel Macron, dans le cadre du confinement, a été un de ceux qui ont reconnu qu'effectivement, il y avait un problème dans le partage de la richesse. Il y avait une dévalorisation des métiers les plus importants dans notre société.
[00:12:38] Il a dit qu'il faudra qu'on s'en souvienne. Et ça fait cinq ans. Donc, spoiler, un salaire reflète rarement l'utilité sociale du métier concerné. Et pourtant, les inégalités de salaire sont souvent perçues, soit comme naturelles, soit comme inévitables. En fait, on questionne assez peu pourquoi il y a des inégalités de salaire. Et on se demande encore moins si c'est souhaitable. Tu dis notamment parce qu'on a tendance à justifier pourquoi ceux qui gagnent le plus le méritent.
[00:13:05] Mais on ne se pose jamais la question de savoir pourquoi ceux qui gagnent moins mériteraient de gagner moins. Tu peux nous en dire plus sur cet angle mort ? Oui, en fait, dans le livre, j'essaye de faire plusieurs retournements comme ça. Effectivement, quand on parle de salaire, que ce soit dans le débat politique ou en privé, à l'arrivée, on cherche essentiellement à justifier pourquoi ceux qui gagnent le plus méritent de gagner le plus.
[00:13:30] Ça, ça permet de valider le caractère juste de l'existence d'inégalités salariales. Moi, je propose d'inverser la logique en disant mais qui dans notre société doit gagner le moins ? Et si on reste toujours sous l'angle du mérite, en gros, ça veut dire de pointer des gens du doigt, pouvoir les regarder droit dans les yeux et de leur dire qu'en fait, on a bien réfléchi. Et toi, tu ne mérites pas plus que le minimum. En fait, tu mérites d'être le perdant de notre société.
[00:13:54] Et en fait, du coup, regarder vers le haut systématiquement en justifiant les rémunérations les plus élevées, donc encourage, valide la logique des inégalités. Et à mon sens, regarder vers le bas en disant mais en fait, qui doit perdre cette bagarre pour les salaires ? À mon sens, ça doit nous conduire par davantage d'égalité. Oui, le problème, c'est qu'on ne décide pas collectivement de tous les salaires de tout le monde. Le problème, c'est que la plupart du temps, les questions salariales sont abordées de manière interindividuelle
[00:14:23] entre l'employeur et l'employé. Éventuellement, dans le cadre de discussions de branches et parfois en termes de pouvoir d'achat, mais sans qu'on tienne compte à chaque fois du caractère relatif des salaires. En fait, ton salaire me coûte cher. Il faudrait pouvoir se dire, indépendamment de notre propre situation, il faudrait être capable de se dire qui doit gagner combien dans notre société. Du coup, tu proposes une autre expérience de pensée.
[00:14:51] Et si on supprimait toutes les inégalités de salaire, qu'est-ce qui se passerait si tout le monde était payé pareil, quel que soit le poste ? Toi, tu penses qu'il se passerait quoi ? Alors, le raisonnement, c'est de se dire, la norme, c'est l'égalité. C'est à chaque fois qu'on s'écarte de l'égalité qu'on doit pouvoir apporter une justification satisfaisante. Et ça, je pense qu'on l'a oublié. C'est-à-dire qu'on va partir du principe que les inégalités, c'est naturel. Les inégalités, c'est naturel, etc. À l'inverse, c'est l'égalité qui doit être la norme.
[00:15:21] Il faut pouvoir justifier tout écart. Et donc, au lieu de se dire comment justifier les inégalités, je propose de dire, mais qu'est-ce qu'il faut changer dans notre société pour qu'on puisse accepter toutes et tous d'être payés pareil ? Et sans doute qu'il faudrait changer plein de choses. Tout ça, j'y reviendrai sans doute après. La crainte qu'on a dès lors qu'on imagine un salaire unique, par exemple, c'est la question de la réalisation de certaines tâches. Si tout le monde est payé pareil. Alors, généralement, une des craintes, c'est
[00:15:51] mais qui voudrait être médecin ou des trucs du genre-là ? Parce qu'on se figure aussi que faire des études, c'est quelque chose d'horrible. On aurait plus peur pour les ménages que pour les médecins. Et du coup, la plupart du temps. Donc, c'est d'abord, on se dit, mais est-ce qu'on va trouver suffisamment de gens qui seront d'accord pour faire des études longues, pour faire des boulots qui sont exigeants intellectuellement, etc. Moi, je ne me fais pas trop de souci de ce côté-là. Et puis ensuite, se pose la question des boulots pénibles. Qui acceptera de faire des boulots pénibles
[00:16:19] si on est toutes et tous payés pareil ? Ça, c'est une question qui vient souvent quand on parle, enfin surtout quand on parle de revenus inconditionnels. Je suis un des défenseurs du revenu inconditionnel aujourd'hui en France. Donc, je dis que tout le monde devrait percevoir un revenu sans condition et sans contrepartie, un revenu suffisamment élevé pour pouvoir se passer durablement d'emploi. C'est-à-dire un revenu suffisamment élevé pour pouvoir refuser un emploi si on définit que les conditions d'embauche ne sont pas satisfaisantes, que les conditions de rémunération ne sont pas satisfaisantes, etc. Et en fait, très vite, l'objection, c'est
[00:16:47] mais qui fera le boulot chiant si on a la possibilité d'avoir un salaire sans forcément avoir un emploi ? Ce qui me semble être une très bonne question, mais qui pointe, à mon sens, l'injustice extrême de notre système salarial aujourd'hui, puisque en fait, aujourd'hui, on a la possibilité de payer très mal ceux qui font ces boulots chiants, alors que de mon point de vue, ça devrait être le principal critère de justification des inégalités salariales. Plus mon boulot est chiant, plus je devrais être payé. Oui. Et puis, pour moi, il y a aussi,
[00:17:17] je ne suis pas du tout expert du revenu inconditionnel, mais une question classique qui revient aussi, de est-ce qu'on aura encore envie de travailler ? Oui, mais même chose. En fait, à ce moment-là, ça pose la question du regard qu'on pose sur l'emploi et des objectifs collectifs qu'on veut se donner. Effectivement, j'espère que si on mettait en place un revenu inconditionnel, on serait nombreux et nombreuses à se dire qu'il y a des choses vachement plus intéressantes à faire dans la vie, que de chercher à bosser 35 heures par semaine ou plus, que de chercher à produire toujours plus d'année en année.
[00:17:47] Ça va être mon côté décroissant qui parle. J'espère qu'on pourrait, à ce moment-là, se donner comme objectif, non pas de produire des emplois autant que possible, en faisant de l'emploi le produit final de notre activité économique, en se disant que l'emploi est un bien à part entière. J'espère qu'on ferait le choix, à l'inverse, de se dire comment est-ce qu'on s'organise collectivement pour avoir à bosser le moins possible, tout en répondant au mieux à nos besoins, en nous posant en amont la question du suffisant.
[00:18:13] Je crois qu'à l'époque, tu proposais un revenu égal au seuil de pauvreté, sans condition ni contrepartie, égal à 1100 euros en France. Je ne sais pas, j'imagine qu'il y a eu des modélisations pour savoir est-ce que ce serait payable par la société ou est-ce que ce serait dans le rouge, dans le vert, je n'en sais rien. Oui, je peux y répondre très vite, parce que c'est une très grosse question. Si on tire le fil, on va très loin. Mathématiquement, c'est possible. Et après, en même temps, moi, ma position maintenant, c'est peu importe de savoir si c'est possible ou pas.
[00:18:43] Moi, je défends le revenu inconditionnel essentiellement comme expérience de pensée, en me disant que le revenu inconditionnel permet de pointer plein de dysfonctionnements de notre société actuelle. Et toutes les objections qui sont opposées au revenu inconditionnel peuvent aisément être retournées contre la société actuelle. Donc typiquement, les tâches pénibles, on en a parlé tout à l'heure, on met en place un revenu inconditionnel mais qui fera les tâches pénibles. Qui les fait aujourd'hui ? Est-ce que c'est juste, en fait, de déléguer, reléguer systématiquement les tâches pénibles aux subalternes ? À aucun moment, c'est juste. En fait, se poser cette question-là,
[00:19:13] ça revient à dire heureusement qu'il y a des pauvres aujourd'hui qui n'ont pas d'autre choix que de réaliser les tâches pénibles à notre place. Et à aucun moment, c'est juste. Quand je le dis à haute voix, je me rends compte que je ne devrais pas le dire. Donc du coup, ça permet de se dire il y a des choses dans notre société qui ne fonctionnent pas. Le revenu inconditionnel, je dis souvent, il faut passer la société au révélateur du revenu inconditionnel. Le revenu inconditionnel permet de révéler tous ces dysfonctionnements. N'attendons surtout pas la mise en place d'un revenu inconditionnel pour traiter ces dysfonctionnements. Et lorsque nous aurons traité ces dysfonctionnements, alors sans doute que nous n'aurons plus besoin de mettre en place un revenu inconditionnel,
[00:19:43] en tout cas pas tel que je l'ai défini. Donc inutile de se poser la question des modalités de financement aujourd'hui, ici, maintenant, d'un revenu inconditionnel, sachant que mon objectif, ce n'est pas qu'on mette en place un revenu inconditionnel, mais bien qu'on transforme notre société. Trop bien. La question sous-jacente, c'est si on est au cas avec le fait qu'il y a certaines inégalités salariales qui du coup seraient justes, c'est quoi un salaire juste ? Parce qu'on peut très bien se dire qu'effectivement, un médecin qui soigne les gens, qui potentiellement a fait beaucoup d'études,
[00:20:13] mérite de gagner plus, je ne sais pas, qu'un comptable ou peu importe, je ne sais pas. Là, ça suppose, et donc c'est le fil conducteur du livre, c'est ça, c'est j'essaye de faire une sorte d'enquête pour savoir quel est le critère juste qui permet de déterminer les inégalités salariales. Je commence par la question des études. Là, tu parles du médecin. Alors, à mon sens, on fantasme un peu le côté les médecins, études longues, etc. Parce qu'à l'arrivée, on fait tous des études longues.
[00:20:42] Quand on est en poste, on apprend en permanence et on apprend à faire mieux notre boulot. Donc, je pense que, de mon point de vue, on fait tous des études longues. Après, la question qui se pose, c'est pourquoi est-ce que les études devraient donner lieu à un surcroît de rémunération ? En vertu de quoi ? À titre personnel, j'ai plutôt aimé mes études. Je suis prof aujourd'hui. Je considère que je suis étudiant à vie. Donc, du coup, j'ai du mal à considérer que les études, c'est une période si difficile qu'elles devraient justifier
[00:21:12] un surcroît de rémunération. Je fais le calcul dans le livre rapidement. Mais si on se dit, admettons, les études, c'est une période pendant laquelle on n'a pas de revenus et donc c'est un manque à gagner, mais c'est surtout ça. Si, c'est surtout ça. Oui, tu compenses juste ça. On lisse sur la carrière, ça permet de justifier des écarts de 200 euros par mois. On n'est pas dans les écarts de rémunération qu'on peut avoir aujourd'hui. si j'ajoute le coût des études. C'est-à-dire que si on fait des études dans des écoles privées,
[00:21:41] on peut payer des écoles 15 000 euros l'année. Même chose. Je lisse sur la carrière, ça fait 200 euros de plus. Donc, ça permet d'avoir là un delta de 400 euros tout cumulé. Pas plus. Ok, donc les études, ce ne serait pas un bon critère d'un salaire juriste ? Les études ne me semblent pas un bon critère, d'autant qu'aujourd'hui, ces études conduisent la plupart du temps à avoir des boulots qui sont plutôt valorisés dans notre société, qui sont plutôt plaisants. Et donc là, non seulement on a un boulot qui est valorisé, non seulement on a un boulot qui est plaisant,
[00:22:11] donc rémunération symbolique, rémunération sociale et en plus, surcroît de rémunération économique. On est vraiment gagnant sur toute la ligne avec un degré de pénibilité qui est relativement faible. Donc du coup, cette question des études ne me semble pas juste comme critère de justification des inégalités, mais souvent on utilise ce critère des études comme proxy pour parler de la productivité. En fait, on dit puisque j'ai fait de longues études, alors ça veut dire que je suis plus efficace, je suis plus productif. Parce que je suis plus productif, du coup, je contribue davantage à un enrichissement collectif. Mais là aussi, en fait, il y a un problème. La question de la productivité,
[00:22:40] on s'aperçoit assez vite qu'elle repose sur un raisonnement circulaire où on va évaluer la productivité des gens en fonction de leur niveau de rémunération. Ça, c'est Philippe Askenazi qui est un économiste qui a très bien montré ça dans un livre qui s'appelle Tous Rentiers notamment. On prend l'exemple, par exemple, d'un hôtel. Dans un hôtel, il y a plein de postes différents et les femmes de ménage vont être le personnel le moins bien payé de l'hôtel. Comment est-ce qu'on peut justifier leur niveau de rémunération ? En fait, ce sont celles qui sont les moins productives. Comment on sait
[00:23:10] qu'elles sont les moins productives ? Il n'y a qu'à regarder leur salaire. C'est les salaires les plus faibles. Donc, c'est bien la preuve qu'elles sont faiblement productives. Et donc, on a un raisonnement circulaire comme ça qui permet juste de valider le rapport de force dans la détermination des salaires. Donc, la productivité ne semble pas être un bon critère non plus. Oui, et puis même si tu es le meilleur lanceur de missiles, est-ce que c'est vraiment juste ? La société n'a peut-être pas besoin de mettre hyper productif en missiles. C'est la question de l'utilité. Ça, c'est la question de l'utilité. Et cette question de l'utilité, alors, à la limite, l'utilité,
[00:23:39] on pourrait se dire ça, ça peut être un bon critère. La question qui se pose immédiatement, c'est comment est-ce qu'on la mesure ? On en parlait tout à l'heure. Autour social sur investissement, c'est une approche qui est biaisée. Le PIB, c'est une manière aussi d'essayer d'évaluer l'utilité des activités en fonction de la contribution du coup à la richesse économique. Mais on s'aperçoit que le PIB est un très mauvais indicateur de richesse. Donc, on ne peut pas s'appuyer là-dessus. Et une autre approche, ça va être l'approche en termes de besoins essentiels.
[00:24:09] Et là, même chose. En fait, ça, on l'a vu, c'est un des enseignements qu'on peut tirer de la période Covid. Au moment où il s'est agi d'arrêter la liste des activités essentielles, les métiers essentiels, ceux qui pouvaient continuer à bosser dans le cadre du confinement, en fait, on s'est rendu compte qu'on n'était pas toutes et tous d'accord sur la liste qui a été proposée. Notamment, on s'est rendu compte que dans le champ de la culture, on avait dit non, tout ça, ce n'est pas essentiel. Et alors, je parle juste pour moi, mais je pense que mon expérience pourrait être partagé. Je ne me vois pas vivre
[00:24:38] une vie de confinement. C'est-à-dire que les terrasses, les bars, les cinémas, les théâtres, etc., c'est des choses qui, à mon sens, comptent. Sans ça, la vie n'est clairement pas la même. Donc, j'aurais tendance à les faire rentrer dans la catégorie des activités essentielles. En fait, la difficulté de cette catégorie des activités essentielles, c'est qu'aujourd'hui, la plupart du temps, elle est abordée sous l'angle de la pyramide de Maslow, en se disant d'abord, il nous faut des activités qui nous permettent de répondre
[00:25:08] à nos besoins physiologiques. Il nous faut manger, dormir, boire, se loger, sécurité physique, etc. Et puis, le reste, on verra. En fait, non, le reste, on ne verra pas. Le reste, c'est juste indispensable, c'est juste essentiel. Et donc, ça ne permet pas d'avoir un critère pertinent de discrimination entre les activités. Donc, on n'a pas une piste d'un début de quelque chose qui pourrait faire « Ok, ça, c'est un salaire juste » ou que ce soit choisi collectivement. On peut éventuellement faire un tri politique entre les activités nuisibles et les activités qui contribuent
[00:25:38] à l'enrichissement collectif. Mais une fois qu'on a dit « Une activité contribue à l'enrichissement collectif », alors il est difficile d'avoir un classement « Ça, ça contribue plus » ou « Ça, ça contribue moins », etc. Il pourrait déjà y avoir cette distinction. Ça, il faut le faire. C'est aussi un des combats des décroissants et décroissantes. Dire en fait, il faut faire le tri dans les activités. Aujourd'hui, on produit trop, on consomme trop, on travaille trop. Il faut tout faire en moins et en mieux. Ça suppose de faire des choix politiques sur les trucs qu'il faut continuer à faire et les trucs qu'il faut arrêter de faire. Ça, c'est une certitude. Par contre, ça ne nous permet pas d'en tirer des conclusions en termes de niveau de rémunération.
[00:26:08] Donc, l'utilité commune ne semble pas être un bon critère non plus. C'est pour ça que moi, je m'en remets à la pénibilité en disant « C'est la pénibilité qui doit être le principal critère de justification des inégalités salariales ». Mais une fois que j'ai dit ça, une fois que j'ai dit ça, mon côté égalitariste me rattrape et je me dis « Mais en fait, si je dis le niveau de pénibilité des activités permet de justifier les inégalités salariales, ça veut dire que je valide implicitement des inégalités de pénibilité. Ça veut dire que je dis effectivement il y en a qui doivent avoir des boulots plus pénibles,
[00:26:36] plus chiants que les autres. » Et on retombe dans une logique de division morale du travail où on se dit « On va reléguer systématiquement les tâches pénibles à d'autres ». Ça me pose problème. Et donc, je me dis « Il faut chercher l'égalité salariale. Pour chercher l'égalité salariale, il faut remettre en cause la division actuelle du travail. » C'est intéressant ce que tu disais juste avant parce qu'il pourrait y avoir effectivement une sorte de bonus-malus entre par exemple, je ne sais pas, sur les salaires
[00:27:05] des métiers dits pénibles, donc ce que tu disais, je ne sais plus le commercial, je ne sais plus quoi, le trader, etc., qui soient reversés aux métiers les plus pénibles d'infirmières et tout. Attends, tu dis « Il faudrait qu'il y ait une contribution ? » Ouais. Alors du coup, si c'est une redistribution, ça veut dire que dans un premier temps, le trader, le commercial, le cadre dans la pub et le gestionnaire de fortune ont une plus forte rémunération,
[00:27:34] donc avec une forte rémunération symbolique qui va avec. C'est-à-dire qu'ils peuvent dire « En fait, c'est nous qui sommes les mieux payés dans la société, mais généreusement, on va reverser une partie de notre salaire à ceux qui font les tâches pénibles. Regardez un peu quelle est notre grandeur d'âme. Ça, c'est pas acceptable en fait. C'est une rustine. À aucun moment, c'est acceptable. En fait, il faut, dès le début, au moment de la répartition, revaloriser les métiers les plus pénibles dans ce cadre-là. L'enjeu, c'est ça. Et surtout, en fait, l'autre question que ça pose,
[00:28:03] c'est que ça permet de voir à quel point aujourd'hui, il est aisé, et on ne le voit même plus en fait, il est aisé de déléguer les tâches pénibles à d'autres. C'est un exemple que je prends dans le livre en jetant sous le bus, comme on dit, deux copains. Un couple d'amis qui m'avait dit un jour, assez fièrement, que c'était au moment où les livraisons à vélo commençaient à se développer, livraisons à vélo pour les repas. Et ils m'avaient dit, Baptiste, on a fait appel à un livreur à vélo.
[00:28:32] Et ils le disent vraiment avec une certaine fierté. Ils savent que je suis écolo. Et donc, ils se disent, on a fait une chose, une belle action. Ils l'ont pas dit à la bonne personne. C'est cool, c'est cool. La planète vous remercie et c'est très bien. Mais en même temps, vous avez deux bras de jambe, vous êtes tout à fait capable d'aller chercher votre repas directement à la source. Et là, ils m'expliquent que ce n'est pas vraiment grave parce que le restaurant était juste à côté, ce qui fait que le livreur a pu se faire payer une course qui ne lui a pas demandé énormément d'efforts. En faisant abstraction du fait que sans doute le livreur
[00:29:02] n'était pas juste à côté du restaurant, mais peu importe. Donc du coup, je leur dis, là, vous étiez juste à côté, vous avez la capacité d'aller encore plus chercher votre repas juste à côté. Et là, ils m'expliquent qu'en fait, il pleuvait. Il pleuvait. Donc, évidemment que... Pour lui, il ne pleuvait pas. On ne pouvait pas aller chercher notre repas. Et donc, ils ne se rendaient pas compte qu'ils avaient juste délégué la pénibilité. Ils n'avaient pas envie d'être mouillés. Ils avaient délégué la pénibilité. Et là, je le tourne en ridicule parce que c'était grossier. Mais en fait, quotidiennement, on délègue la pénibilité
[00:29:32] et on ne s'en rend même pas compte. En fait, on a le luxe d'invisibiliser toute cette rélégation des tâches pénibles à d'autres. Et c'est ça qui est problématique. Donc, il ne s'agit pas simplement de reverser généreusement à d'autres. Il faut reconnaître clairement quelle est la contribution de chacun et chacune et arrêter de déléguer la pénibilité. Alors, quelle autre solution pourrait sembler prioritaire pour une société plus juste ? Est-ce que c'est limiter les hauts revenus comme dans l'économie sociale et solidaire où un patron ne peut pas gagner dix fois plus que ses salariés ? Est-ce que c'est, je ne sais pas, valoriser les métiers utiles,
[00:30:02] taxer davantage les rentes, avoir une sorte de revenu plancher, revenu plafond ? Alors, la transparence. Déjà, la transparence, c'est un vrai enjeu parce que dès lors qu'il y a de la transparence, on est obligé de justifier les inégalités salariales. Là, en fait, vu que ce n'est pas transparent, il peut y avoir des inégalités, il n'y a pas à les justifier. En fait, là, la question revient notamment sur les inégalités femmes-hommes en matière de rémunération. s'il y avait une totale transparence,
[00:30:32] en fait, on verrait au grand jour les inégalités salariales et on ne pourrait pas juste dire « Oui, écoute, Justine, tu gagnes moins que Marc, mais tu comprends, c'est Marc, c'est un homme. » En fait, il faut pouvoir le justifier. Donc, la transparence, c'est important. Ensuite, il y a la question des écarts. La question des écarts, effectivement, moi, je serais plutôt favorable arbre à un plafonnement des rémunérations. La question qui se pose, c'est quand bien même on s'appuie sur une logique de mérite, ce qui ne va pas être mon cas. Mais quand bien même on s'appuie sur une logique de mérite, la question, c'est combien de fois on peut être plus méritant
[00:31:02] qu'un autre ? Est-ce qu'on peut être mille fois plus méritant qu'un autre ? Je ne crois pas. En fait, il faut réussir à trouver des ordres de grandeur. Le SS, effectivement, a trouvé une réponse qui ne me semble pas satisfaisante pour autant, mais en plafonnant les rémunérations. Dans la fonction publique, les rémunérations sont plafonnées. Il faudrait généraliser ce type de plafonnement. À titre personnel, j'aurais tendance à dire qu'un rapport de 1 à 4 me semble largement suffisant. Largement. Après, la loi ESUS, c'est 1 à 10, mais la plupart des boîtes qui l'appliquent font beaucoup moins que ça. Mais autant le mettre
[00:31:31] direct dans la loi. Exactement. Et puis après, l'autre question qui se pose, c'est la question de la procédure. Comment sont élaborées les grilles de salaire ? Et là-dessus, dans le champ de l'ESS, certaines structures vont adopter des grilles de salaire, mais de manière démocratique. Et à partir du moment où ces grilles de salaire sont transparentes et élaborées de manière démocratique, de fait, on voit un resserrement des inégalités. Du coup, avec un copain sociologue de l'ESS qui s'appelle Simon Contamars,
[00:32:00] on a écrit un livre après ce que nos salaires disent de nous qui s'appelle Travailler son patron. On revient sur ces logiques d'autositions. Donc, ces collectifs qui décident de s'organiser sans chef. Et il y a tout un chapitre qui va être concerné, consacré aux questions d'équité. Équité qui renvoie à la question de la propriété et qui renvoie aussi à la question des salaires. Et en fait, on s'aperçoit que pour ces structures autogérées, c'est plus tant la question du critère de justification des inégalités qui va être importante,
[00:32:30] c'est la question de la procédure. À partir du moment où tout le monde a son mot à dire sur la manière dont on va partager la valeur au sein du collectif, alors en fait, très vite, les écarts sont très faibles et si les écarts sont très faibles, alors peu importe le critère en fait, c'est pas le plus important. Trop bien. Merci Baptiste. De rien, merci. Faites un maximum de bruit pour Baptiste s'il vous plaît. Si vous voulez plus d'épisodes avec des humains rayonnants comme Baptiste, abonnez-vous au podcast Soif de Sens et parlez-en à un ami,
[00:33:00] ça m'aide énormément. Ciao tout le monde.